La psychomotricité relationnelle est une pratique fort développée en Belgique francophone, c’est à dire en Wallonie 🇧🇪 Dans une moindre mesure, on rencontre également cette spécificité en France 🇫🇷 Mais pourquoi différencier la psychomotricité relationnelle de la psychomotricité tout court ? Que recouvre cette pratique ?
🤙 C’est une question qui m’est souvent posée en première intention lorsque vous me contactez au téléphone pour vous renseigner sur mes services de psychomotricienne. Il est vrai que la pratique de la psychomotricité est plurielle et qu’il n’est pas toujours simple de s’y retrouver 🤷🏻♀️ Voilà pourquoi j’ai décidé de faire le point sur le sujet en rédigeant cet article.
Psychomotricité relationnelle versus psychomotricité à l’école
En Belgique, les enfants de l’école maternelle ont la grande chance d’aller à la psychomot, et ce pour deux périodes de 50 minutes par semaine. Cela fait partie du décret qui encadre les activités d’enseignement. Ces deux périodes hebdomadaires sont donc obligatoires dès l’entrée à l’école maternelle en classe d’accueil et ce, jusqu’en 3ème maternelle. Chaque enfant belge fait donc de la psychomot à l’école de 2,5 à 6 ans.
La psychomotricité à l’école se vit en groupe classe. Elle est le plus souvent organisée dans la salle de gymnastique ou le hall omnisport de l’école, un espace suffisamment grand pour accueillir l’ensemble de la classe dans des activités suscitant mouvement et jeux collectifs ⚽️
Elle est encadrée par une personne spécifiquement formée à cette approche pédagogique de la psychomotricité en milieu scolaire. Le titre requis est celui de « maître de psychomotricité » dans l’enseignement maternel ordinaire. Plusieurs parcours de formation peuvent y mener, à partir d’une formation initiale dans l’enseignement, l’éducation physique, l’éducation spécialisée ou le paramédical.
🎯 Les objectifs des activités psychomotrices proposées en groupe au sein de l’école maternelle sont quadruples :
- Construire des habiletés motrices globales et fines ;
- Développer les habiletés sociales ;
- Gérer sa santé et sa sécurité ;
- Développer son autonomie.
➡️ Par son mode d’organisation, le profil des encadrants et ses objectifs pédagogiques, la psychomotricité à l’école est donc bien différente de l’approche paramédicale proposée par un psychomotricien dans son cabinet de consultation ou en institution de soin.
Psychomotricité relationnelle versus psychomotricité loisir
🤸 La psychomotricité apparaît d’autre part régulièrement au sein du panel d’activités loisirs et de stages de vacances accessibles aux enfants, notamment dans les clubs de sport et les associations récréatives.
Là aussi, les activités dites de psychomotricité sont organisées en collectivité et encadrées par des moniteurs aux parcours divers et variés (dont la formation complémentaire en psychomotricité n’est pas forcément de mise).
Dans cette optique, l’approche de la psychomotricité renvoie souvent à des activités qui sollicitent les enfants dans leurs habiletés motrices (globales et fines), sensorielles et sociales. Bricolages, jeux, activité physique à l’intérieur ou en nature, initiation au sport ou aux arts de la scène, tout est possible.
Ces activités variées sollicitent effectivement les aptitudes psychomotrices des enfants participants. Mais peut-on automatiquement qualifier de psychomotricité toute activité dès lors qu’elle suscite chez l’enfant la mise en jeu de ses compétences psychomotrices ?
C’est un raccourci bien présent puisque le mot « psychomotricité » est à la fois utilisé en français pour désigner une pratique et un aspect du corps humain. Pourtant, ce n’est pas parce qu’une activité met en jeu une personne dans sa psychomotricité qu’elle correspond à une pratique psychomotrice en tant que telle. Ce serait fort réducteur et le métier de psychomotricien perdrait tout son sens.
➡️ Ainsi, les modalités d’organisation et d’encadrement de la « psychomotricité loisir » diffèrent également bien largement des soins psychomoteurs proposés en cabinet ou en institution par des psychomotriciens de formation paramédicale.
Psychomotricité relationnelle versus psychomotricité fonctionnelle
👀 Les professionnels de la psychomotricité eux-mêmes ne sont pas toujours d’accord sur la manière de définir leur métier. De grands débats d’idées s’articulent autour de 2 enjeux principaux :
📍 La psychomotricité (en tant que pratique) relève-t-elle de la rééducation ou de la thérapie ?
📍 La psychomotricité (l’objet de la pratique, c’est-à-dire la psychomotricité comme fonctionnement du corps) peut-elle être saisie par la méthodologie scientifique ?
Les uns vous diront que la psychomotricité est une approche thérapeutique qui considère le corps comme le fondement de la construction psychique, avec un référentiel théorique très ancré dans la psychanalyse. Les troubles psychomoteurs sont ainsi considérés par ce prisme analytique. Les outils du psychomotricien sont liés à son propre engagement corporel, aux enjeux psychiques de la relation créée avec le patient et à l’analyse de la symbolique de son expressivité corporelle.
Ceux-ci se réclament d’une « psychomotricité relationnelle » dont l’objet serait insaisissable par des méthodologies scientifiques trop réductrices des paramètres psychocorporels à l’œuvre dans les séances, écartant ainsi une approche plus terre-à-terre et surtout scientifiquement fondée au profit d’analyses subjectives et biaisées de l’expression corporelle des patients.
Les autres définiront plutôt la psychomotricité comme une fonction parmi les autres, dans le corps humain, avec un référentiel théorique neuro-développemental et cognitivo-comportemental. Les troubles psychomoteurs sont objectivés par des outils d’évaluation standardisée, qu’ils soient quantitatifs ou qualitatifs, afin d’établir un diagnostic et un plan de traitement. Les outils du psychomotricien appartiennent au champ rééducatif avec des méthodologies ayant montré leurs preuves dans la littérature scientifique.
Ceux-ci se réclament plutôt d’une psychomotricité rééducative scientifiquement fondée, sans pour autant mettre à l’écart tous les processus en jeu dans la relation de soin, s’avouant bien incapables d’analyser des contenus psychiques enfouis dans l’expressivité corporelle d’un patient et réfutant tout référentiel psychanalytique.
😇 Vous aurez certainement compris, à la lecture de cet article, que celui-ci n’est pas neutre et que je penche en faveur d’une approche rééducative de la psychomotricité. Pour moi, la rééducation est une forme de thérapie ; et la psychanalyse appartient à l’Histoire avec un grand H.
Et si on parlait plutôt d’une psychomotricité paramédicale ?
Étant donné la multiplicité (et la disparité) des approches de la psychomotricité en Belgique, on comprend bien pourquoi les psychomotriciens (mais aussi les prescripteurs et les patients) ont ressenti le besoin de renommer leur approche.
Le concept de « psychomotricité relationnelle » permettrait donc, dans une certaine mesure, de différencier la psychomotricité pratiquée par des psychomotriciens diplômés du paramédical de celle pratiquée à l’école ou dans les activités parascolaires et de loisir.
Cependant, comme nous l’avons vu plus haut, le concept de « psychomotricité relationnelle » peut également revêtir une dimension analytique bien éloignée des fondements scientifiques du domaine du paramédical.
De mon côté, j’évite l’utilisation du concept de « psychomotricité relationnelle » car je ne souhaite pas m’inscrire dans une approche psychanalytique de l’accompagnement de l’enfant. J’ai ainsi tendance à utiliser le concept de « psychomotricité » tout court, tel que c’est le cas dans le consortium européen. Et si la nécessité de spécifier mon approche par rapport à l’école ou au loisir se fait ressentir, j’ai choisi d’insister sur la dimension paramédicale, fondée sur une méthodologie scientifique et les données probantes en la matière.
En guise de conclusion, voici donc ma proposition : et-si on parlait plutôt de psychomotricité paramédicale ?