À la naissance, votre bébé découvrira une nouvelle organisation du temps, faite de ruptures et de séquences, ce qui contraste avec la tranquille continuité qu’il connaissait jusqu’alors. Il s’agira d’abord pour lui de trouver son rythme dans l’alternance des phases d’éveil, de repos et d’alimentation. Son développement consistera ensuite en une succession temporelle d’étapes et de nouvelles acquisitions, vers toujours plus d’autonomie.
À la crèche et puis à l’école (tout comme à la maison ou chez Mamy et Papy), votre enfant devra comprendre comment ces lieux structurent le temps et s’y ajuster dans son corps et dans ses apprentissages.
Plus tard, il aura à s’orienter dans le temps et en maîtriser les différentes notions pour pouvoir lui-même faire preuve de structuration temporelle dans ses activités et sa compréhension du monde.
Vous l’aurez compris, la relation au temps est l’un des cruciaux enjeux du développement de l’enfant. Or, notre propre rapport aux temps d’adultes est, actuellement, plus que jamais fragilisé !
Quel rythme imposez-vous à votre enfant ?
Dès la naissance, il est question pour nous, adultes, d’aider notre bébé à se rythmer. Et ce rythme qu’on souhaite tant que notre merveille adopte le plus rapidement possible, c’est bien le nôtre … Un rythme calqué sur le jour et la nuit, sur une grande période d’activité suivie d’une grande période de repos, sur 3 repas par jour, sur des minutes et des heures, des agendas et des habitudes qui se répètent de jour en jour pour nous structurer, nous adultes, dans notre rapport au temps.
Or, nous avons un rapport au temps sensiblement accéléré. Nous courrons après le temps comme si celui-ci nous emmenait toujours plus vite d’une journée à l’autre, d’un mois à l’autre, d’une année à l’autre ; nous forçant à laisser derrière-nous nombreux projets, envies, désirs que nous ne nous octroyons pas « faute de temps » justement.
Nous remplissons nos agendas, forts de nos croyances limitantes fondées sur les obligations de productivité et d’efficacité véhiculées par notre société. Nous oublions de nous poser, de prendre des pauses pour simplement respirer et profiter de l’instant présent, avant de repartir vers les tâches qui nous agitent dans une course perpétuelle contre la montre.
Et nous répercutons ce fonctionnement sur nos enfants … Nous développons inconsciemment des attentes vis-à-vis de ceux-ci qui ne leur correspondent pas, car leur rapport au temps est différent, encore bien éloigné de tous ces diktats et fonctionnements !
Ainsi, nous attendons d’eux qu’ils puissent s’adapter à notre propre rythme (effréné) de vie, qu’ils marchent tôt, qu’ils soient le plus vite autonomes, qu’ils soient « propres » pour leur entrée à l’école maternelle, qu’ils fassent déjà des bricolages pour leur première fête des mères ou des pères, qu’ils jouent/dorment quand c’est le moment de jouer/dormir, qu’ils se lèvent tôt et se couchent tard, qu’ils aient faim à midi pile, qu’ils ne soient pas à fleur de peau juste au moment de faire les courses, …
Nous leur planifions déjà leur agenda comme de petits ministres ! Tel jour à la crèche/école, tel jour chez Mamy, telle activité le weekend … Et, pour les plus grands : un sport, un mouvement de jeunesse et une activité artistique … Nos enfants n’ont plus l’occasion de s’ennuyer !
La construction du temps
Bien sûr, l’intégration du temps fait partie des apprentissages de nos enfants. Leurs rythmes doivent se réguler pour s’ajuster à ceux de la vie quotidienne. Ils doivent apprendre à se projeter dans le futur et à se rappeler du passé pour s’organiser dans le moment présent. Les notions de durée, de succession, d’attente et de changement vont être découvertes puis maîtrisées au fur et à mesure de leur croissance.
L’un de nos rôle d’adultes, parent ou éducateur, est d’accompagner l’enfant dans cet apprentissage des notions temporelles. À la maison, à la crèche et à l’école, soutenons les enfants dans leur compréhension de l’organisation temporelle du monde dans lequel nous vivons.
C’est la raison pour laquelle le rapport au temps est une construction complexe, ancrée dans la vie quotidienne, et forcément soumise aux influences de l’environnement relationnel de l’enfant.
Tandis que le temps, lui, est immuable. Quoiqu’il arrive, une seconde restera toujours une seconde ; une heure, une heure et une journée, une journée !
Soyons donc conscients de notre propre rapport au temps, des valeurs que nous y accolons, de ce que l’on y projette, de la manière dont nous nous créons nous-mêmes des contraintes stressantes en lien avec cette notion de temps … pour éviter de le transmettre ou le répercuter sur nos enfants !
Ode à la lenteur
Pour se construire, les enfants ont besoin de temps. Et pas n’importe lequel : du temps de qualité, étiré en longueur, qui soit respecté et non tiré/poussé par des facteurs extérieurs (comme notre empressement d’adulte par exemple), qui puisse se répéter autant de fois que nécessaire et, surtout, dans lequel les enfants peuvent s’installer pour apprendre !
Ils ont besoin de temps pour dormir, pour jouer, pour s’ennuyer, pour rire, pour découvrir, pour exprimer leurs colères ou leurs chagrins, pour dépasser une difficulté, pour apprendre une nouvelle compétence, pour parfois revenir en arrière, pour profiter d’un câlin, … La liste est longue ?
- Parce qu’un enfant a besoin de passer du temps à ramper et à marcher à 4 pattes pour consolider ses acquis préalables à la marche sur deux jambes.
- Parce qu’un enfant a besoin de temps pour réguler une émotion forte et retrouver le calme après la tempête.
- Parce qu’un enfant a besoin de temps pour faire des essais, des erreurs, tenter des variantes et finalement, apprendre une nouvelle manière de faire, par lui-même.
- Parce qu’un enfant a besoin de temps pour assimiler la manière dont fonctionne son corps et toutes les expériences qu’il est amené à vivre au quotidien.
- Parce qu’un enfant a besoin de temps pour s’ennuyer et ainsi apprendre à déployer sa créativité, son imagination, ses propres ressources pour s’occuper de manière autonome.
- Parce qu’un enfant a besoin de temps pour profiter de son enfance et grandir à son rythme, avant de devenir un adulte accompli.
Un enfant n’a pas le temps de se dépêcher ou d’être en retard ! Il a besoin de profiter de ce temps que nous ne savons pas toujours accueillir comme il se doit, nous adultes.
Peut-être devrions nous prendre exemple sur nos petits, lorsqu’ils s’autorisent innocemment à sortir des sentiers battus en matière de temps ?
Merci !!! ? Que cest gentil !
Hihi, avec plaisir 🙂
Quelle bel éloge de la lenteur. Bravo et merci.